Un été en Volvo électrique

Elle passe relativement inaperçue car elle ne s’encombre pas des traditionnels gimmicks esthétiques ou logos flashy verts ou bleus mais ma Volvo XC40 P8 “Pure Electric” est bien 100% électrique. Et c’est à son bord que j’ai fait 2300 km en 15 jours cet été, quittant la Suisse et Lausanne pour rejoindre le Sud-Ouest de la France, les Landes, le Pays Basque. Je partage ici un compte-rendu, qui éclairera peut-être ceux qui se questionnent sur la pertinence de ces motorisations pour les longs parcours. Il se veut général et applicable à tous les véhicules électriques mais mon retour sur la Volvo XC40 en particulier est inclus en fin d’article.

Au bord de l’océan, après plus de 980 km sans émettre de CO2 en route.

Je ne reviendrai pas sur les aspects écologiques, d’autres l’ont déjà fait et il est désormais communément admis que si produire une nouvelle voiture a un coût CO2 indéniable, sur sa durée de vie standard, une voiture électrique sera moins pire que son équivalent thermique. Sur ce sujet, je recommande la lecture de ce post, ou de celui-ci.

Au delà de ces aspects écologiques et de l’impact sur le climat, la vraie question beaucoup plus égoïste qui revient sans cesse est “à quel point voyager en électrique est une galère ?“.

La réponse est simple : ce n’en est pas une, dès lors que l’on planifie son trajet. Pour le pilote privé que je suis, c’est en fait la simple transposition d’une bonne habitude aéronautique, à un mode de transport terrestre. Planifier, et toujours avoir un plan B. Et cela ne prend pas des heures :

Première étape, renseigner l’itinéraire prévu dans l’application (ou le site) ABRP (A Better Route Planner). Le calcul prend en compte le modèle de voiture, son autonomie théorique (ajustable), les conditions météos, dénivelés, etc. Le calcul est en général presque aussi juste que l’estimation à bord de la Volvo (qui est elle presque parfaite !).

Ensuite, l’utilisation du site ou de l’application Chargemap permet de vérifier l’état général des bornes suggérées par ABRP, grâce aux contributions d’une communauté très active.

Enfin, une fois sur place, l’application ChargePrice permet de choisir le badge de rechargement qui sera le plus économique. Un peu comme si pour chaque appel à l’étranger, vous pouviez choisir à chaque fois le forfait le plus avantageux. Dans mon cas, sur les bornes Ionity, le partenariat Plugsurfing/Volvo (temporaire, hélas) est très avantageux et recharger la batterie de 20 à 80% ne m’a coûté qu’une quinzaine d’euros (… et environ 40 minutes de pause petit-déjeuner bien appréciée).

Sur les bornes de villages en France, plus lentes, moins chères, ce sont en général les badges Chargemap ou Chargepoint qui se révèlent intéressants. J’ai eu la chance de séjourner 15 jours dans les Landes, qui est l’un des départements français les mieux pourvu en bornes (qui fonctionnent !).

Avec un peu d’habitude, mises bout à bout, ces étapes ne prennent pas plus de 5-10 minutes.

Les badges que j’évoque nécessitent de s’inscrire, de laisser des coordonnées de carte de crédit ou PayPal. Il est possible de commander un badge ou d’utiliser le smartphone (NFC ou scan d’un QRcode sur la borne).

Le site Mac4Ever a mis en ligne une vidéo qui explique bien cela.

Problèmes de charge

Tout n’est pas toujours parfait. J’ai eu un étrange problème et un ticket a été créé chez Chargepoint : suite à une recharge sans histoire chez TotalEnergies à Merignac, une deuxième facturation a eu lieu, comme si la charge du conducteur ou de la conductrice suivant(e) m’avait été imputée. J’attends un remboursement. (mise à jour : remboursement crédité une semaine plus tard sur mon compte Chargepoint)

J’ai également vu une borne complètement plantée comme un vieux PC Windows, une autre qui ne reconnaissait plus aucun badge mais qui a retrouvé ses esprits un peu plus tard (un serveur d’authentification qui rebootait chez le fournisseur ?) mais rien qui ait pu me donner des sueurs froides. J’avais toujours un plan B pas loin.

Le problème le plus fréquent en France n’est pas d’ordre technique mais est lié au facteur humain.

Le problème le plus fréquent rencontré en France n’est pas d’ordre technique mais est lié au facteur humain. A plusieurs reprises, l’unique borne de charge sur autoroute était squattée par un véhicule hybride, chargeant sa petite batterie à vitesse de tortue (pour ensuite la consommer en quelques kilomètres avant de repasser au thermique). C’est absurde et cela empêche les conducteurs de véhicules 100% électriques un peu justes de poursuivre leur voyage. Heureusement pour moi, je privilégie les grandes aires avec de multiples bornes. Il est aussi fréquent de voir des véhicules thermiques squatter les places dédiées aux électriques dans le centre-ville des agglomérations touristiques où les places se font rares. L’espoir d’amélioration repose sur la multiplication des bornes ou sur une meilleure éducation du conducteur moyen. Je ne compte pas trop sur cette dernière option. A l’inverse, quand les gens sont civilisés, cela permet de se garer plus facilement qu’avec un thermique. Ce fut le cas pour moi à St Jean-de-Luz, sur une place réservée à 5 minutes à pieds du centre-ville.

La grande question de l’autonomie

Pour faire court : là aussi, un peu d’esprit aéronautique ne peut pas faire de mal. Gérer son énergie est un état d’esprit qui permet de gagner beaucoup de temps.

Réduire sa vitesse permet d’arriver plus vite.

Cela peut sembler contre-intuitif mais pour arriver plus vite, réduire légèrement sa vitesse est une bonne idée. Très concrètement, rouler à 120 km/h sur autoroute (comme en Suisse) au lieu de 130 km/h m’a permis sur un trajet de 244 km d’arriver avec plus de 22% de batterie au lieu des plus ou moins 10% calculés par la Volvo au départ. Dans certains cas, cela permet de se passer d’une étape de recharge et donc de gagner du temps car les 10 km/h de différence sur un tel trajet sont peu significatifs.

Rouler à 120 km/h au lieu de 130 ? Difficile à vivre pour certains qui ne supportent pas de se faire doubler par des TDI énervés mais je le vis bien, merci. Rouler en silence est un luxe qui compense au centuple.

Et sinon, cette Volvo XC40 “P8” ?

Et bien, pour commencer, je ne sais jamais comment l’appeler. Volvo a changé son nom plusieurs fois depuis sa commercialisation en 2020. P8, Recharge, Pure Electric, Twin… appelons la “P8”. Pour faire simple, tous les tests sur le web disent la même chose :

  • Seule la calandre lisse, couleur carrosserie permet de la distinguer des modèles thermiques/hybrides – j’ajouterai que le magnifique coloris de la mienne, “Sage Green” est aussi exclusif à cette motorisation.
  • Elle est confortable et bien finie – c’est vrai, même si c’est un cran en dessous de mon ancienne BMW Série 3. La finition cuir/alcantara est toutefois réjouissante, les sièges confortables, et les plastiques bien moussés, sauf en partie basse.
  • Elle est chère (en tout cas dans cette première version à deux moteurs)
  • Elle est très (trop ?) performante … 408ch, avec un o-100 km/h en moins de 5 secondes. – C’est vrai que c’est bluffant mais bien peu utile au quotidien. En revanche, en hiver, les deux moteurs amènent la traction intégrale et en Suisse et sous la neige, cela peut être intéressant occasionnellement.
  • Son autonomie est un peu juste. – la Volvo est effectivement moins efficiente qu’une Tesla ou qu’une Hyundai Kona. Mais la Volvo correspondait plus à ce que j’attends d’une voiture dans tous les autres domaines. A chacun ses critères : on ne choisit pas une Porsche pour sa sobriété en carburant ou un Kangoo pour son esthétique. Et puis surtout, à 150kW sur bornes rapides (e.g. Ionity, Total Energies), la Volvo recharge très vite, et plus vite que nombre de ses concurrentes actuelles. Seuls Tesla, Porsche et la nouvelle Hyundai Ioniq 5 font théoriquement mieux. En tout cas avec des températures entre 12 et 30° cet été, sur autoroute, aucun trajet ne s’est révélé impossible ou pénible. Seul à bord mais avec de lourds bagages, la Volvo a consommé environ 24kW au 100 sur autoroute et 22.8kW en mixte, avec une grande proportion toujours sur autoroute. Cela donne une autonomie théorique sur ce type de trajets rapides d’environ 300km entre deux bornes. Cela me suffit et puis j’ai toujours combiné une pause bienvenue avec une recharge en 30 à 40 minutes.

    En hiver, nous verrons, mais ma XC40 étant équipée d’une pompe à chaleur, la dégradation de l’autonomie devrait être contenue.

La pompe à chaleur permet d’épargner la batterie par température très froide mais assiste aussi la climatisation.

 

  • Android Automotive est l’un des meilleurs OS automobile actuel.

– C’est vrai, même s’il connait encore quelques bugs de jeunesse. J’ai du le rebooter 3 ou 4 fois, ce qui prend une vingtaine de secondes : à la livraison, la carte ne s’affichait plus dans l’écran conducteur, par deux fois la radio ne sortait plus de son et je crois que c’est à peu près tout. Les mises à jour, elles, se font en OTA, de manière transparente. Au quotidien, Google Maps et la recherche de bornes sur le trajet sont idéales. L’estimation de l’autonomie est très fiable et s’ajuste en temps réel, notamment si l’on conduit un peu en dessous de la limite. Spotify intégré, combiné à l’audio Harman Kardon accompagne agréablement les trajets. Apple CarPlay est reporté promis pour la fin de l’année (ça roupille chez Google/Volvo ?) mais cela ne me manque pas pour l’instant vu l’offre logicielle intégrée. En revanche, la recharge par induction constitue un excellent grille-pain pour qui veut faire fondre son iPhone. A la lecture des forums, je ne suis pas le seul à avoir constaté ce souci. D’abord trop faiblarde ou incompatible avec l’iPhone 12, il semble que la dernière mise à jour ait inversé le problème. je ne l’utilise donc qu’occasionnellement et utilise un câble (USB-C <> Lightning) si nécessaire.

  • les aides à la conduite sont efficaces. – C’est vrai et c’est très plaisant sur autoroute. La voiture reste dans sa voie sans osciller latéralement, le régulateur de vitesse adaptatif fait son job, les commandes au volant sont bien disposées.

Je recommande au passage cet essai vidéo réalisé par le site Automobile Propre.

Conclusion

Au final, ces 2300 km ont été très agréables. Plus que cela, ils ont été très satisfaisants pour le geek que je suis. Faire une pause café après une étape bien préparée, sans histoire, en vérifiant sur l’iPhone où en est la charge de la voiture est un plaisir de technophile. Toutefois, il faut reconnaître que pour qui a du mal avec les apps sur son smartphone, veut juste monter dans sa voiture et parcourir 800 km sans s’arrêter, l’électrique n’est pas encore la solution parfaite. Mais en lien avec la densification et la fiabilisation du réseau de bornes de recharge, la diminution du coût des batteries, l’optimisation de l’efficience, il n’y aura bientôt plus à hésiter. Je ne reviendrais plus en arrière et n’ai plus aucune envie de brûler du pétrole à 130 sur l’autoroute ou dans les centres-villes.

Bonne route !

Recharge de 20 à 80% en 35 à 40 minutes. Le temps d’une pause déjeuner.

One thought on “Un été en Volvo électrique”

  1. J’ai pu faire une expérience similaire cet été aussi, à bord de notre récent Kia e-Niro.
    Mon retour est un peu plus mitigé que celui de Rémi.
    Moi aussi pilote, je suis partisan des déplacements “bien préparés”. Et c’est mon épouse, qui a fait, seule avec les enfants, le trajet Grenoble Bassin d’Arcachon. Elle a, bien sûr, regardé les applications et prévu les arrêts en fonction des bornes de rechargement. Sauf que… elle a voulu passer par le massif central (A89). Et là, on se heurte à un problème de taille : l’infrastructure électrique n’est pas (encore) au rendez-vous.
    Oui, il y a bien des bornes, mais en gros : soit elles sont hyper lentes (1 h 30 min nécessaires), soit elles sont en panne, soit elles sont déjà occupées… Bref, son trajet, au lieu des 8 h habituelles, a duré plus de 12 h, avec pas mal de stress et moi en support, à l’autre bout du fil, pour l’aider à trouver des solutions (zones dépeuplées, horaires de nuit,…).
    La Kia e-Niro a une belle autonomie (455 km) et plus de 450 km mesurés effectivement.
    Et oui, rouler à 120 km/h est significativement meilleur pour l’autonomie que 130 km/h (même si la voiture atteint le 160 km/h sans problème !).
    Mais la Kia, si elle peut bénéficier des chargeurs Ionity, ne peut pas aller sur le réseau Tesla (le seul qui “tienne la route” si je puis me permettre ce jeu de mots, car fiable et bien entretenu). Et la multiplicité des solutions de recharge (lire : cartes de paiement, réseaux…) est un vrai casse-tête pour l’utilisateur lambda !
    Par contre, comme la voiture de Rémi, elle est bien équipée, confortable et agréable à conduire.
    Donc, aujourd’hui, alors que professionnellement, on me propose une voiture de fonction 100% électrique, je freine des 4 fers, car il m’arrive d’avoir de grands trajets à faire plusieurs fois par mois, et je ne me vois pas les faire dans ces conditions…

    Je suis convaincu que ces voitures électriques sont l’avenir de nos déplacements. Mais comme pour les voitures thermiques au début, il faut que l’infrastructure suive le mouvement. Rappelez-vous dans les années 60, il y avait des stations service partout sur le territoire (vue la consommation des voitures à l’époque, c’était effectivement indispensable !!!). Aujourd’hui, pour l’électrique, on en est très loin, aussi bien en termes de densité d’implémentation, qu’en termes de service (les tentatives de captation des “clients” par des cartes spécifiques ou des réseaux incompatibles entre eux, n’est que l’illustration de cet archaïsme commercial).

    À suivre donc

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